mercredi 20 mars 2019

Réunion du groupe des lecteurs du 28 02 19

Lise : Le vin de solitude d'Irène Némirovsky. Hélène a 8 ans et vit à Kiev dans une famillle de la haute bourgeoisie. Son père, Boris est juif et possède des mines d'or en Sibérie. Nous sommes en 1903. Boris fait vivre femme, fille et beaux parents. Hélène vivra avec le trio père-mère-jeune amant de sa mère.  Ils déménagent au gré des affaires paternelles et des fuites si bien qu'ils n'auront de vrai ancrage nulle part. La fortune de Boris se déplacera à Paris avant qu'il ne soit désargenté et, malade, ne décéde. Hélène aura la haine de sa mère puis fera sa valise pour partir, avec son chat, afin de se libérer de cette famille malsaine. Non sans avoir séduit l'amant de sa mère pour se venger d'elle. Descriptions et style superbes. 

Michèle Laurent : Les cendres d'Angela, une enfance irlandaise de Franck Mc Court. C'est l'enfance de l'auteur à partir de ses 4 ans, en Irlande, au retour de la famille des Etats Unis. Description réaliste d'une enfance misérable, incroyablement sordide, avec la mère qui doit se battre seule. Un témoignage de dignité. « Pire que toutes les enfances misérables ». La description de la naissance spectaculaire de la petite sœur est un événement mémorable. C'est aussi une histoire rayonnante dans laquelle « on s'y voit ». Emerveillement de lecture.

Martine : Les amants du spoutnik d'Haruki Murakami. Histoire japonaise à trois personnages :K., le narrateur, professeur des écoles, solitaire, Sumire, émotive et fantasque, qui écrit sans publier et Miu son aînée de 17 ans. Miu et Sumir s'aiment mais Sumir est davantage amoureuse. Elle devient la secrétaire de Miu et se socialise. Elles partent en voyage à travers des pays d'Europe et Sumir, qui s'occupe de tout facilite la vie de Mui lui faisant vivre, ainsi, ses premières vraies vacances. Sumir va insister auprès de Mui pour qu'elle lui raconte son secret, son histoire cachée. Souvenir qui disparaîtra aussitôt. La mémoire d'un ordinateur révèlera deux rêves, dont le fameux et mystérieux secret.La fin est étrange, déroutante, entre rêve et réalité.

Michèle Chapelain : Je viens de toutes mes enfances de Jacques Salomé. Sa mère a 16 ans à sa naissance. Elle est à l'Assistance Publique et y restera, avec son enfant, jusqu'à sa majorité à 21 ans.             À  ses 9 ans, Jacques, atteint de la tuberculose osseuse, partira pour passer 5 années en sanatorium, période pendant laquelle sa mère ne pourra lui rendre visite que quatre fois. Il n'aura de cesse de protéger cette mère, abandonnée petite, qu'il surprendra pleurant et s'adressant à  propre mère qu'elle veut retrouver. Il la rassurera sur ses « bonnes nuits » alors que, transpirant, il ne cesse de faire des cauchemards épouvantables. A 15 ans, Jacques parlait à son père, Pierre, qu'il ne verra jamais, mais dont sa mère lui a donné une belle image. Pour Jacques Salomé on a plusieurs enfances : familiale, amicale, amoureuse, adolescente, imaginaire. Survivre aux situations rencontrées est facilité par l'imaginaire.                                 Il aura été porteur d'une très grande tristesse et aura eu beaucoup d'amour maternel.

Nicole : Noli me tangere d'Andréa Camilleri. Cette jeune femme, italienne, quitte son domicile pour se rendre dans sa maison de campagne où elle n'arrivera jamais. Son mari est inquiet et souhaite qu'on enquête. On retrouve bien sa voiture dans un lac mais aucune trace de la disparue. Elle a eu beaucoup d'amants. Son professeur d'art se souvient de sa brillance et de sa fascination pour le tableau Noli me tangere (« ne me touche pas ») dont elle avait une interprétation forte. Ce sera le seul indice pour orienter les recherches...
  
Chantal : La vraie vie d'AdelineDieudonné. Une adolescente protège son petit frère qu'elle veut sauver car il va de plus en plus mal à la suite d'un choc psychologique. Sa mère est inexistante, terrorisée par un père horrible. Passionnée de sciences physiques elle fait du baby sitting pour s'offrir des cours particuliers.     C'est le récit de son combat dans cette famille où elle ne peut compter que sur elle (sa mère est éloignée des enfants, c'est une « amibe »). La fin est dramatique et libératoire. C'est l'histoire d'une jeune lutteuse dont la « vraie vie » fut semée de peurs et de situations atroces.

Eric : S'enfuir, récit d'un otage de Guy Delisle. B.D. L'auteur a enregistré le récit de la captivité de Guy, membre d'une ONG, pris en otage en Tchétchénie pendant 112 jours. Ses geoliers ne l'ont pas brutalisé mais ils n'avaient aucun moyen de communication. Menotté, accroché à un radiateur, puis à un anneau dans le sol, il n'est détaché que quelques instants, juste pour le nécessaire. On entre dans la solitude de l'otage, on partage ses doutes, ses rêves de mariage, le défilé de l'histoire de Napoléon dont il est un admirateur, les fois où il pensait étrangler ses gardiens, ses hésitations à saisir des opportunités de fuite, etc... Il fera le pas depuis une salle de bains et les péripéties de cette évasion le conduiront en Russie avec, au final,  cette promenade en voiture d'ambassade. Ce livre est très agréable à lire.                                                        L'avancée des travaux d'Etienne Davodeau. B.D. De courtes nouvelles. « ça vaut le coup d'être lu ».   

Roger : Le dernier banquet de Jonathan Grimwood. Petit enfant misérable mangeant des scarabbées sur un tas de fumier alors que ses parents, nobles désargentés, sont assassinés, il est « sauvé » par un duc et ses soldats. Placé en institution il se liera avec d'autres nobles qui deviendront pour certains les plus proches conseillers  du roi. Notre héros, féru de cuisine, créera des recettes plus improbables les unes que les autres, avec toutes sortes de viandes : serpent, chat, chien, insectes, animaux de ménagerie …..jusqu'à la dernière, stupéfiante, avant de mourir dans des circonstances peu communes (d'où le titre)....Sa destinée sera des plus aventureuses. Il cotoiera la Cour et vivra ses intrigues. Représentant du Roi de France auprès des dirigeants corses, il échappera de justesse à la mort, car une guerre féroce est engagée entre temps pour l'annexion de l'Ile. Il est sympathique car son attitude avec les femmes est décalée par rapport à l'odieux machisme ambiant. Il est, aussi, atypique avec ses sujets qu'il ne traite pas avec hauteur et n'accable pas davantage contrairement à ses pairs qui usent entre autre, du droit de vie ou de mort, avec cruauté.


Debout les morts, Fred VARGAS. (Février 2019)
Fred VARGAS est née en 1957, c’est son nom de plume qui fait référence parmi les auteurs policiers français.
Frédérique Audoin-Rouzeau est ou plutôt était avant qu’elle se consacre désormais à l’écriture une archéozoologue qui a écrit de nombreux ouvrages savants pour rendre compte de ces recherches archéologiques et zoologiques.
Dans ces romans policiers elle est fidèle à quelques personnages toujours un peu décalés, son principal héros, le commissaire Adamsberg apparaît dans de nombreux romans, les trois évangélistes participent à trois histoires, mais Fred Vargas aime mélanger les personnages, dans certains romans les évangélistes rencontrent le commissaire Adamsberg pour former un mélange détonant.   
« Debout les morts » est son quatrième roman paru en 1995, il a été récompensé à deux reprises, par le prix du polar de la ville du Mans et par le prix mystère de la critique en 1996.
C’est l’histoire de… trois mecs dans la « merde », selon leurs dires. Tous les trois historiens chercheurs, sans emploi ou presque. Marc, le médiéviste, a trouvé une vieille baraque pourrie, il recherche des colocataires parce que le loyer même modeste est au-dessus de ses moyens. Il pense à Luc, spécialiste de la première guerre mondiale, actuellement remplaçant dans un établissement privé, et à Mathieu, le passionné des origines de l’homme bloqué dans un univers de cueilleurs chasseurs. Tous trois, plus ou moins à la rue dans un avenir très prochain acceptent.
Marc leur impose son oncle et parrain, un ancien flic qui a connu des hauts et des bas dans son administration, le commissaire à la retraite Vandooster. Chacun hérite d’un niveau dans la bicoque en fonction de leur strate d’études historiques à Mathieu, le rez de chaussée, à Marc le premier étage, Luc est au deuxième et Vandooster au grenier…
Ce dernier les appelle vite « les évangélistes », Saint Mathieu, Saint Marc et Saint Luc.
Avec les moyens du bord ils retapent la maison pour qu’elle soit au moins habitable, mais pas de téléphone ni de télévision…
Très vite chacun trouve ses marques et une bonne harmonie règne parmi eux.
Ils font connaissance avec leur voisine, Sophia Siméonidis, une cantatrice célèbre. Elle fait appel à eux pour lever un mystère, un jeune arbre, un hêtre a été planté récemment au fond de leur jardin, son mari ne semble pas inquiet mais elle trouve très bizarre cette apparition. Les trois compères décident de se transformer en ouvriers de la ville pour creuser dessous cet arbre, ils ne trouvent rien.
Delà naît une amitié entre voisins, le mari toujours parti n’est pas associé au groupe. Sophia leur fait connaître son amie Juliette qui tient un petit restaurant dans les environs immédiats.
Mathieu est même embauché comme serveur.
Mais Sophia disparaît sans un mot.
L’ancien flic pousse les évangélistes à se renseigner. De leurs recherches auprès de son mari il en ressort que Sophia serait partie à Lyon rejoindre un ancien ami.
Surviennent alors Alexandra et son fils Cyril. Elle a fait appel à sa tante pour se sortir d’une situation difficile. Marc la trouve, trempée devant le portail de la propriété de Sophia, il l’invite à venir s’abriter chez eux. Elle se refuse à admettre que sa tante ait pu s’absenter sachant qu’elle arrivait avec son fils. Les évangélistes et leur acolyte reprennent l’enquête, Vandooster a gardé un contact dans la police, le commissaire Le Guennec, un breton pur jus avec qui il a partagé quelques galères et quelques virées bretonnes…
L’enquête repart mais on retrouve ce qui semble bien être les restes carbonisées de Sophia dans une voiture incendiée volontairement.
La piste criminelle est évidente mais les recherches piétinent jusqu’à l’arrivée d’un nouveau personnage, Christophe Dompierre..
Il cherche à établir le lien qui pourrait relancer une enquête menée quinze ans plutôt à la mort de son père faussement accusé de trafic de drogue et qui n’a jamais aboutie. Son lien avec Sophia semble ténu mais mais…
Manque de chance alors que notre commando d’investigation était sur une nouvelle piste, Dompierre qui aurait pu les renseigner sur ce qui pouvait relier Sophia à cette vieille histoire se fait assassiner.
Sur le lieu du crime on trouve un couteau avec les empreintes de Sophia.
« Debout les morts ! » s’écrient Saint Luc, Sophia n’est pas morte !
On repart à zéro, Marc ne peut croire à la culpabilité de Sophia, et pourtant tout semble l’accuser, des cheveux qui semblent lui appartenir sont trouvés près du cadavre de Dompierre.
Après ce nouveau rebondissement impossible de lâcher le roman et l’enquête menée par ces personnages loufoques et sentimentaux, Mathieu est « secrètement » amoureux de Juliette et Marc en pince pour Sophia un peu aussi pour Alexandra,  Fred Vargas nous entraîne dans une enquête atypique qui rappelle un peu la veine des romans de Donald Westlake et ses antihéros pleins d’humour.
Difficile de classer ce livre parmi les différents genres du roman policier mais est-ce bien nécessaire si le plaisir de le lire est là du début à la fin.
La fin, justement.
C’est Marc qui va deviner ce qui peut se cacher derrière la trop gentille Juliette, qui aurait tant voulu devenir cantatrice, qui a même remplacé Sophia quand cette dernière a été agressée quinze ans auparavant.
Mais l’expérience a tourné court, les critiques dont le père de Christophe Dompierre ayant mis fin à sa prestation…
La vengeance, voilà le mobile.
Je vous laisse faire un petit effort si vous souhaitez connaître la fin du fin…

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